Depuis sa création l'Europe est sujette à tous les questionnements possibles et inimaginables quant à la convergence des pays membres dans les domaines politiques, économiques et culturels. Il est un domaine qui en 2005 a fait un bond européennement exceptionnel et ambitieux : la comptabilité.
Le 1er Janvier 2005, l'Europe s'est dotée de nouvelles normes comptables qui ont pour objectif final de permettre au mieux la comparaison de la situation des entreprises engagées dans le marché commun, puis dans le marché unique et enfin dans l'euro. Née pourtant dans les années 70, cette idée a connu une très lente évolution qui s'explique par le fait que les pays membres ne sont pas réjouis à l'idée de devoir bouleverser leur système comptable national. Les grandes entreprises multinationales désireuses de pouvoir simplifier leur comptabilité sur le Vieux Continent ont au contraire été des acteurs qui ont lourdement pesés et appuyés la convergence. L'idée est d'aboutir à une comptabilité mondiale qui profiterait aux grands cabinets d'audits, aux banques d'affaires et aux investisseurs institutionnels (fonds de pension). Les grands cabinet de conseil en comptabilité espèrent pouvoir définir des procédures de conseil valables dans tous les pays du monde, ce qui va accroître la rentabilité de leurs produits. Les investisseurs quant à eux, souhaitent à terme, pouvoir plus facilement comparer les entreprises dans des domaines très divers. A terme il s'agit de faire disparaître les particularismes comptables des Etats et d'opter pour une seule et même comptabilité mondiale.
Cette noble ambition n'est pas sans poser des doutes quant à sa mise en place et sa réelle pertinence au niveau européen sans même parler des risques d'instabilité qu'elle peut entraîner. Une année après l'adoption des normes comptables, l'Europe ouvre les yeux (un peu tard) sur les problèmes éventuels de cette dynamique de convergence.
Une notion-clé est développée, celle de " juste valeur». Dans le langage comptable, le mot juste n'a rien à voir avec l'équité; il exprime l'idée de l'IASB que les comptes doivent refléter le plus possible la valeur de marché de ce que les entreprises possèdent (leur actif dans le bilan) et de ce qu'elle doivent (le Passif du bilan). Le problème posé par cette notion est l'instabilité des marchés financiers ; celle-ci va se transmettre aux comptes des entreprises. Evaluer ses actifs au prix des marchés permet d'intégrer rapidement les mouvements de la Bourse: en somme quand celle ci monte, les entreprises paraissent plus riches, ce qui justifie les demandes des actionnaires d'augmenter la distribution de dividendes. Au contraire quand la bourse baisse, l'image comptable des entreprises se dégrade fortement, ce qui renforce le mouvement de baisse.
Or tout ce qui fait la valeur d'une entreprise ne peut pas être mesurée par un marché, par exemple un investissement dans des actions non côtées ou les actifs immatériels (immobilisations corporelles et incorporelles). Dans ce cas, les normes auxquelles l'Europe a adopté proposent d'évaluer avec des modèles théoriques et de faire "comme si " il existait un marché.
Côté risque d'instabilité, les normes ont provoqué des variations des résultats des grandes entreprises européennes de l'ordre de seulement 12% en moyenne. Une évolution modérée
L'Union européenne est la principale responsable de ce changement voulu par les investisseurs financiers et, surtout rempli d'incertitudes. En choisissant d'adhérer aux normes IASB, elle leur a donné une dimension vraiment mondiale, forçant la main aux Etats-Unis qui ont annoncé leur intention de faire aussi converger leurs propres normes vers celles de l'IASB d'ici 2008-2009. Malheureusement, pour être le premier utilisateur mondial, "l'Europe ne s'est pas donné les moyens de peser sur un organisme comptable international qui est totalement doctrinaire, acquis à la cause de la souveraineté actionnariale" dénonce Michel Aglietta dans Dérives du capitalisme financier . L'Europe essaie de se rattraper en négociant actuellement un pouvoir plus important au sein de l'IASB. Affaire à suivre dans les prochains mois!
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