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lundi 30 avril 2007

Iberdrola, l'éolien et la bulle verte

Iberdrola, numéro deux de l’énergie en Espagne, et numéro un mondial de la génération d’énergie éolienne, a fait l’objet de toutes les attentions des investisseurs au cours de ces derniers mois. En effet, le groupe d’origine basque a terminé en avril l’acquisition du géant écossais Scottish Power, pour une valeur de 17,2 milliards d’euros. La transaction, qui avait été annoncée à l’automne dernier, a immédiatement suscité des réactions mitigées de la part des spécialistes.

Vers un monde vert

Le contexte général semble largement favorable à l’investissement. Depuis 2001, le cours de bourse d’Iberdrola affiche ainsi une croissance impressionnante, avec une multiplication par environ 2,3 du prix de l’action. De plus, les énergies renouvelables sont incontestablement dans l’air du temps, et l’Union Européenne prévoit notamment de réduire ses émissions de CO2 de 20% d’ici 2020, ce qui constitue une belle promesse de croissance. Enfin, le secteur des énergies renouvelables bénéficie de subventions conséquentes dans de nombreux Etats. En Espagne cette subvention s’élevait l’an dernier à 97 euros par megawatt-heure pour la fabrication d’énergie éolienne.

Des lendemains qui déchantent…

Or il ne faut pas oublier que sans ces subventions, la génération et la commercialisation d’énergie éolienne ne serait pas rentable ! Selon Colette Lewiner, directrice du secteur de l’énergie chez Capgemini, « le kWh éolien coûte deux fois plus cher que celui du nucléaire ». Les autorités publiques pourraient se rendre compte à terme des coûts d’opportunité engendrés par ces subventions : en Espagne déjà, la subvention devrait baisser d’environ 20% par rapport à 2006. Privé de subvention, le secteur serait également privé de rentabilité.

De plus, l’acquisition de Scottish Power en soi a été vivement critiquée : le prix de 17,2 milliards d’euros ne justifierait pas les perspectives de synergies. Le PDG d’Iberdrola, Ignacio Sánchez Galán, n’a toutefois cessé de répéter les vertus de l’acquisition, qui crée le premier producteur mondial d’énergie renouvelable. Arthur Hoffmann, gérant chez la banque suisse Sarasin, affirme pourtant que « les fusions et acquisitions ont rendu l’éolien beaucoup trop cher, le PER sectoriel atteignant 40 pour 2007.»

Pour la plupart des analystes, l’acquisition n’a pas vraiment un caractère économiquement justifiable et constitue surtout une « acquisition défensive », permettant à Iberdrola de se mettre à l’abri de prédateurs tels que l’allemand Eon. Dernier point à noter : le poids de la dette d’Iberdrola, qui devient préoccupant. Le groupe s’est endetté à hauteur de 7,9 milliards d’euros pour financer son acquisition de Scottish Power, ce qui porte son gearing largement au dessus de 1. De plus, de nouvelles acquisitions internationales sont envisagées, dont des parcs d’éoliennes au Brésil et au Mexique. Ignacio Sánchez Galán aurait-il vu trop grand ?

… ou une valeur sûre pour le long terme ?

Pour les optimistes, l’énergie éolienne et Iberdrola constituent quand même des investissements intéressants. Des améliorations technologiques dans la fabrication des turbines pourraient finalement rendre le secteur rentable sans subventions : il faut rappeler que les coûts de production ont déjà baissé de 80% en 10 ans, et une turbine moderne produit 180 fois plus d’énergie qu’il y a 20 ans.

Par ailleurs, les comparaisons entre la « bulle verte » et la bulle internet d’il y a 10 ans ne semblent pas être justifiées. Certes, on constate un afflux massif de liquidités vers l’éolien, dont une bonne part de fonds spéculatifs, mais les investissements s’orientent cette fois-ci vers des actifs tangibles, à l’inverse des start-ups internet. Les cash-flows sont plus facilement mesurables, et selon Didier Laurens, analyste à la Société Générale, « on peut globalement justifier les valorisations actuelles ».

Enfin, en ce qui concerne Iberdrola, il faut rappeler que l’acquisition de Scottish Power permet également au groupe de d’internationaliser davantage et de ne plus dépendre autant du marché espagnol, où les tarifs tardent à être libéralisés. Un plan stratégique d’expansion vers les Etats-Unis a été dévoilé par Sánchez Galán, qui affirme y voir la meilleure opportunité de consolider sa position de premier producteur d’énergie « propre » au monde. Rappelons toutefois que les énergies renouvelables ne constituent que 25% de la production d’Iberdrola…



Sources :

Iberdrola chief targets US as growth market, Financial Times, 29/4/2007.

Iberdrola chief flags up benefits of a Scottish union, Financial Times, 29/11/2006.

Les valorisations boursières de l’énergie éoliènne font craindre une bulle speculative, Le Monde, 24 février 2007.

La bourse est-elle en proie à une bulle verte ? Grégoire Aladjidi, http://galadjidi.typepad.fr/cleantech/autre/index.html, 18/4/2007

Take the Iberdrola bull by the horns, The Guardian, 18/3/2007

Rapports annuels de Iberdrola

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