L’industrie bancaire européenne est aujourd’hui en ébullition alors que le suspense grandit sur l'issue de la bataille pour le contrôle d'ABN Amro. Exclusivement européenne, cette bataille financière n’implique aucune banque française. Pilier de l’économie française, le secteur bancaire représente plus de 620000 emplois directs et indirects, soit 2,5% de la population active, faisant de cette industrie le premier employeur privé.
Globalement, les banques françaises ont une rentabilité plus faible que les autres. Le rendement des fonds propres est à peu près de 4% en France contre 15% à 20% en Grande Bretagne. Les banques britanniques représentent 68% des profits du secteur bancaire alors que le PNB de la Grande Bretagne équivaut seulement à 13% du PNB européen. Au niveau des capitalisations boursières il en est de même, comparé à HSBC ou Lloyds, les banques françaises sont toutes petites.
Mais le bilan n’est pas non plus si défavorable :
- les 3 premières banques françaises sont classées parmi les 25 plus grandes banques du monde
- l’excellence des banques françaises en matières de dérivés actions n’est plus à prouver
- la France est la 3ème puissance mondiale par la taille de ses grands établissements de crédits (japon, US)
- le réseau international des banques françaises est plutôt bon.
Afin de comprendre ce qui détermine la situation économique actuelle du secteur bancaire français, il faut d’abord garder à l’esprit que la banque n’est pas un secteur comme les autres, en effet le cadre réglementaire est important, les produits proposés sont souvent joints ou complexes et surtout elle a des effets externes sur le reste de l’économie.
SPECIFICITES DU SECTEUR BANCAIRE FRANÇAIS
Le système bancaire français connaît plusieurs spécificités réglementaires qui le différencie du droit communautaire et des législations des autres Etats membres de l’Union Européenne.
1. les règles de protection de la clientèle en France sont plus élevées
C’est en France que l’emprunteur est le plus protégé d’Europe. La réglementation française impose diverses contraintes aux établissements de crédit établis sur son territoire.
En matière de crédit à la consommation, les lois Scrivener et Neiertz prévoient :
- un délai de rétractation de sept jours,
- l’interdépendance entre le contrat principal et le contrat de prêt,
- ainsi que le droit au remboursement anticipé sans aucune indemnité.
Cette législation très protectrice des consommateurs peut être un frein au développement des opérations bancaires transnationales.
Or, l’Union Européenne avance vers une harmonisation optimale des conditions de protection de l’emprunteur. La France pourrait être contrainte d’assouplir sa position pour que les Etats membres de la Communauté offrent un même niveau de protection et pour la concurrence entre tous les établissements soient loyale.
2. Quelques réseaux conservent le monopole de la distribution de certains produits de placement
Successivement, l’Association française des banques et la Fédération bancaire européenne ont déposé des plaintes contre le Livret bleu du Crédit mutuel auprès de la Commission européenne.
Le Livret bleu a, depuis sa création en 1975, perturbé le jeu de la concurrence entre les établissements de crédit français. Depuis l’avènement d’un marché bancaire unique en 1993, cette concurrence déloyale s’est élargie à l’échelle européenne.
Qu’est ce que le livret bleu ?
Le livret bleu est un produit de collecte de l’épargne créé en 1975. Il bénéficie de conditions fiscales spécifiques puisqu’il est défiscalisé sur les deux tiers des intérêts versés aux épargnants (le Crédit mutuel étant tenu de verser au Trésor une redevance assise sur le tiers restant).
Un solde minimum de 15 euro est requis pour les dépôts. Le plafond fixé par le ministère de l’Economie et des finances étant de 15 000 euros pour les personnes physiques et 75 000 euros pour les personnes morales. Son taux, fixé par l’Etat, est de 3% depuis le 28 juin 2000. Auparavant le Crédit mutuel était une association à but non lucratif, mais son activité est depuis 1984 celle une banque généraliste. Et pourtant les avantages particuliers de son produit « le livret bleu » persistent.
Par ailleurs, la concurrence de La Poste est également considérée comme déloyale. La Poste n’est pas soumises aux mêmes contraintes réglementaires et prudentielles que les autres banques.
3. la France est le seul pays européen à ne pas laisser les banques fixer les prix de leurs services librement.
L’interdiction de rémunérer les Dépôts à vue et son corollaire l’interdiction de facturer les chèques, (ce qu’on appelle souvent le « ni-ni ») ainsi que le plafonnement de l’indemnité de remboursement anticipé dans les crédits immobiliers sont des spécificités de la réglementation bancaire française.
La gratuité obligatoire des chèques, considérée comme la contrepartie de la non rémunération des comptes à vue, reste en vigueur en France malgré Le passage à la phase III de l’Union Monétaire au 1er janvier 1999. Elle devrait disparaître lorsque l’interdiction de la rémunération des dépôts sera levée.
Les banques françaises sont donc limitées dans leur liberté de tarification des services bancaires ce qui nuit à leur rentabilité . La tarification des services bancaires constitue une cause essentielle de la moyenne rentabilité des banques françaises. La réglementation contraignante encourage des phénomènes de compensation tels que les dates de valeur et péréquations entre produits de dépôts et produits de crédits et entre clients pour lesquels les banques pratiquent des tarifs faibles, dans le but de les attirer, en compensant sur d’autres clientèles.
STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT POUR FAIRE FACE AUX NOMBREUX DEFIS QUI SE PROFILENT
Plusieurs évolutions du secteur français ont été identifié :
D’abord, la concurrence bancaire va s’intensifier, la scène concurrentielle est pour presque tous les métiers de la banque, mondiale. Il est donc envisageable qu’on voit petit à petit l’émergence d’un groupe d’une dizaine de leaders de taille mondiale. La France doit s’imposer dans ce club de leader.
Ensuite, les nouvelles normes comptables, IFRS, et prudentielles, Bâle II, arrivées en même temps transforment les conditions d’exercice du métier de banquier.
Enfin, les progrès de la technologie et en particulier la télématique offrent au secteur bancaire de nouvelles opportunités de développer des services d’information sécurisés sur internet par exemple.
Pour tirer profits de ses mutations et non pas en pâtir, les banques françaises doivent adopter une nouvelle stratégie.
1. la multispécialisation, deux options s’offrent aux banques françaises : être universelle, c’est à dire couvrir tous les métiers de la banquee ou se concentrer sur quelques domaines où elle est particulièrement douée ou rentable. Il n’y a pas de réponse prédéfinie mais ce qu’on observe de plus en plus aujourd’hui pour les banques françaises c’est d’être une banque généraliste sur le marché national et de se spécialiser à l’étranger.
2. quelles relations entretenir avec le monde de l’assurance : faut-il se développer dans ces activités, qui sont assez similaires ? C’est à dire repenser leur stratégie de risque ou simplement passer un accord avec un acteur majeur de ce secteur ?
3. la banque à distance et internet. Près de deux tiers des transactions s’effectuent déjà hors agence et les français ne vont plus que cinq fois par an voir leur banquier. Voilà une opportunité pour le secteur bancaire, qui reste un secteur de main d’œuvre essentiellement, de concentrer son recrutement sur les activités commerciales plutôt que d’accueil ou d’administration.
sources:
https://www.federationsump.org/horde/drupal/UserFiles/images/fedepro/banque_finance_assurance/Le_secteur_bancaire_en_France.doc
http://www.banque-france.fr/fr/supervi/telechar/supervi_banc/cb/2002/etude3.pdf
http://www.lyc-arsonval-brive.ac-limoges.fr/secosoc/article.php3?id_article=16
"La polémique sur les tarifs bancaires n'est pas une spécificité française" Les Echos 19/04/2007
Kadra ZIANI
Globalement, les banques françaises ont une rentabilité plus faible que les autres. Le rendement des fonds propres est à peu près de 4% en France contre 15% à 20% en Grande Bretagne. Les banques britanniques représentent 68% des profits du secteur bancaire alors que le PNB de la Grande Bretagne équivaut seulement à 13% du PNB européen. Au niveau des capitalisations boursières il en est de même, comparé à HSBC ou Lloyds, les banques françaises sont toutes petites.
Mais le bilan n’est pas non plus si défavorable :
- les 3 premières banques françaises sont classées parmi les 25 plus grandes banques du monde
- l’excellence des banques françaises en matières de dérivés actions n’est plus à prouver
- la France est la 3ème puissance mondiale par la taille de ses grands établissements de crédits (japon, US)
- le réseau international des banques françaises est plutôt bon.
Afin de comprendre ce qui détermine la situation économique actuelle du secteur bancaire français, il faut d’abord garder à l’esprit que la banque n’est pas un secteur comme les autres, en effet le cadre réglementaire est important, les produits proposés sont souvent joints ou complexes et surtout elle a des effets externes sur le reste de l’économie.
SPECIFICITES DU SECTEUR BANCAIRE FRANÇAIS
Le système bancaire français connaît plusieurs spécificités réglementaires qui le différencie du droit communautaire et des législations des autres Etats membres de l’Union Européenne.
1. les règles de protection de la clientèle en France sont plus élevées
C’est en France que l’emprunteur est le plus protégé d’Europe. La réglementation française impose diverses contraintes aux établissements de crédit établis sur son territoire.
En matière de crédit à la consommation, les lois Scrivener et Neiertz prévoient :
- un délai de rétractation de sept jours,
- l’interdépendance entre le contrat principal et le contrat de prêt,
- ainsi que le droit au remboursement anticipé sans aucune indemnité.
Cette législation très protectrice des consommateurs peut être un frein au développement des opérations bancaires transnationales.
Or, l’Union Européenne avance vers une harmonisation optimale des conditions de protection de l’emprunteur. La France pourrait être contrainte d’assouplir sa position pour que les Etats membres de la Communauté offrent un même niveau de protection et pour la concurrence entre tous les établissements soient loyale.
2. Quelques réseaux conservent le monopole de la distribution de certains produits de placement
Successivement, l’Association française des banques et la Fédération bancaire européenne ont déposé des plaintes contre le Livret bleu du Crédit mutuel auprès de la Commission européenne.
Le Livret bleu a, depuis sa création en 1975, perturbé le jeu de la concurrence entre les établissements de crédit français. Depuis l’avènement d’un marché bancaire unique en 1993, cette concurrence déloyale s’est élargie à l’échelle européenne.
Qu’est ce que le livret bleu ?
Le livret bleu est un produit de collecte de l’épargne créé en 1975. Il bénéficie de conditions fiscales spécifiques puisqu’il est défiscalisé sur les deux tiers des intérêts versés aux épargnants (le Crédit mutuel étant tenu de verser au Trésor une redevance assise sur le tiers restant).
Un solde minimum de 15 euro est requis pour les dépôts. Le plafond fixé par le ministère de l’Economie et des finances étant de 15 000 euros pour les personnes physiques et 75 000 euros pour les personnes morales. Son taux, fixé par l’Etat, est de 3% depuis le 28 juin 2000. Auparavant le Crédit mutuel était une association à but non lucratif, mais son activité est depuis 1984 celle une banque généraliste. Et pourtant les avantages particuliers de son produit « le livret bleu » persistent.
Par ailleurs, la concurrence de La Poste est également considérée comme déloyale. La Poste n’est pas soumises aux mêmes contraintes réglementaires et prudentielles que les autres banques.
3. la France est le seul pays européen à ne pas laisser les banques fixer les prix de leurs services librement.
L’interdiction de rémunérer les Dépôts à vue et son corollaire l’interdiction de facturer les chèques, (ce qu’on appelle souvent le « ni-ni ») ainsi que le plafonnement de l’indemnité de remboursement anticipé dans les crédits immobiliers sont des spécificités de la réglementation bancaire française.
La gratuité obligatoire des chèques, considérée comme la contrepartie de la non rémunération des comptes à vue, reste en vigueur en France malgré Le passage à la phase III de l’Union Monétaire au 1er janvier 1999. Elle devrait disparaître lorsque l’interdiction de la rémunération des dépôts sera levée.
Les banques françaises sont donc limitées dans leur liberté de tarification des services bancaires ce qui nuit à leur rentabilité . La tarification des services bancaires constitue une cause essentielle de la moyenne rentabilité des banques françaises. La réglementation contraignante encourage des phénomènes de compensation tels que les dates de valeur et péréquations entre produits de dépôts et produits de crédits et entre clients pour lesquels les banques pratiquent des tarifs faibles, dans le but de les attirer, en compensant sur d’autres clientèles.
STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT POUR FAIRE FACE AUX NOMBREUX DEFIS QUI SE PROFILENT
Plusieurs évolutions du secteur français ont été identifié :
D’abord, la concurrence bancaire va s’intensifier, la scène concurrentielle est pour presque tous les métiers de la banque, mondiale. Il est donc envisageable qu’on voit petit à petit l’émergence d’un groupe d’une dizaine de leaders de taille mondiale. La France doit s’imposer dans ce club de leader.
Ensuite, les nouvelles normes comptables, IFRS, et prudentielles, Bâle II, arrivées en même temps transforment les conditions d’exercice du métier de banquier.
Enfin, les progrès de la technologie et en particulier la télématique offrent au secteur bancaire de nouvelles opportunités de développer des services d’information sécurisés sur internet par exemple.
Pour tirer profits de ses mutations et non pas en pâtir, les banques françaises doivent adopter une nouvelle stratégie.
1. la multispécialisation, deux options s’offrent aux banques françaises : être universelle, c’est à dire couvrir tous les métiers de la banquee ou se concentrer sur quelques domaines où elle est particulièrement douée ou rentable. Il n’y a pas de réponse prédéfinie mais ce qu’on observe de plus en plus aujourd’hui pour les banques françaises c’est d’être une banque généraliste sur le marché national et de se spécialiser à l’étranger.
2. quelles relations entretenir avec le monde de l’assurance : faut-il se développer dans ces activités, qui sont assez similaires ? C’est à dire repenser leur stratégie de risque ou simplement passer un accord avec un acteur majeur de ce secteur ?
3. la banque à distance et internet. Près de deux tiers des transactions s’effectuent déjà hors agence et les français ne vont plus que cinq fois par an voir leur banquier. Voilà une opportunité pour le secteur bancaire, qui reste un secteur de main d’œuvre essentiellement, de concentrer son recrutement sur les activités commerciales plutôt que d’accueil ou d’administration.
sources:
https://www.federationsump.org/horde/drupal/UserFiles/images/fedepro/banque_finance_assurance/Le_secteur_bancaire_en_France.doc
http://www.banque-france.fr/fr/supervi/telechar/supervi_banc/cb/2002/etude3.pdf
http://www.lyc-arsonval-brive.ac-limoges.fr/secosoc/article.php3?id_article=16
"La polémique sur les tarifs bancaires n'est pas une spécificité française" Les Echos 19/04/2007
Kadra ZIANI